Ramdam a reçu plusieurs messages, Ces lettres, avec l’autorisation de leurs auteurs, nous vous les communiquons telles qu’elles, sans commentaires, elles se suffisent à elles mêmes
Lettre du DGS (Directeur Général des Services) de Pouillon, monsieur Guillaume Boy, démissionnaire. (Reçu par courrier électronique)
Monsieur le Député / Madame la Sénatrice / Madame la Préfète / Madame la Secrétaire Générale de la sous préfecture / Monsieur le Sous Préfet / Monsieur le Directeur du Centre de gestion / Mesdames et Messieurs les Conseillers départementaux / Monsieur le Président de la CCPOA / Monsieur le Maire / Mesdames et Messieurs les conseillers municipaux / Mesdames et Messieurs les chefs de services / Mesdames les directrices d’école / Mesdames et Messieurs les représentants des parents d’élèves / Mesdames et Messieurs de l’association des parents d’élèves,
Mesdames et Messieurs
Je vous informe qu’après la suspension de mes fonctions qui m’a été infligée pour la durée maximale de 4 mois, j’ai décidé, contraint et forcé, de quitter la Commune de Pouillon.
Comme vous le savez, la Commune de Pouillon a été touchée par un droit de retrait exercé à titre individuel par les agents de la Commune.
Ce droit de retrait a eu une influence sur mon rôle de DGS dans un contexte de présomption de harcèlement sexuel et moral de son maire et de souffrances collectives des agents au travail.
Je voudrais rappeler qu’à ma prise de fonctions, j’ai rencontré individuellement l’ensemble des personnels, des adjoints, des instances.
J’ai constaté comme beaucoup d’entre vous le mauvais fonctionnement administratif et organisationnel de la Commune de Pouillon et l’absence d’un certain nombre de dispositifs obligatoires liés à la gestion des ressources humaines notamment.
Ma première réaction a été de travailler sur ces dysfonctionnements. Mais j’ai constaté surtout le mal-être des agents et la souffrance qui rendent la Commune ingérable en termes d’évolutions et d’améliorations de tout ordre.
J’ai aussi vu, durant cette période, les larmes régulières des agents, les suivis psychologiques de certains agents dans le cadre de l’affaire concernant le maire, l’épuisement professionnel et les risques sur la santé des personnels avec de réelles possibilités de gestes mortels.
Le Maire, les adjoints et les élus de la majorité n’ont jamais pu ignorer cet état de fait, que Marion Garcia [ancienne DGS] leur avait déjà relaté et que je leur ai relaté très régulièrement en l’espace de deux mois. A ce titre, je me permets ici de joindre une note que Madame GARCIA a transmis aux élus, au mois d’avril 2022, sur l’état des lieux de la Commune à laquelle je m’associe totalement. Rien n’a changé depuis ce mail.
Dans ce contexte, je voudrais revenir sur mon rôle du DGS et le pourquoi de mon propre droit de retrait. Le DGS est choisi par le maire et les élus, mais il est aussi le responsable de l’administration.
Voilà les faits que je vous présente et auxquels j’ai été confronté dans le cadre des fonctions de DGS en lien avec Monsieur le maire :
· Monsieur le maire avoue à son DGS avoir fait des bisous à des agents et avoir proposé d’en inviter certaines à diner au casino de Salies du Béarn
· Monsieur le maire demande à son DGS avec insistance de rédiger des notes pour qu’il puisse revenir en mairie, devant témoin et en le harcelant téléphoniquement pour que ce soit fait (et cela a été fait au demeurant sous cette pression).
· Monsieur le Maire fait exprès d’oublier son DGS à une réunion alors qu’il lui dit qu’il va chercher son cahier et qu’il revient
· Monsieur le Maire demande à son DGS de virer les plaignantes de la mairie pour lui permettre de revenir en mairie.
· Je découvre les témoignages faits par les agents pendant la visite du CHSCT sur ceux qu’ils ont subi. Je serais plus précis en reprenant les éléments posés sur le compte rendu du CHSCT.
Voilà aussi les actions des adjoints et leurs comportements et actions auxquels j’ai été confronté dans le cadre de mes fonctions de DGS :
· J’apprends qu’une adjointe a été victime, l’ayant communiqué elle-même en conseil municipal, et que dans un deuxième temps elle demande à ne plus être considérée comme victime?
· Madame SIBERCHICOT Marie José pousse, oralement, les agents des services techniques à se soulever contre le maire
· Madame TASTET Régine demande au DGS d’enquêter sur les prestations facturées à la Mairie par le 1er adjoint.
· Madame TASTET Corinne refuse de saluer certains agents de la Commune sous prétexte qu’ils ont relaté au DGS des soucis passés à l’école maternelle
· Monsieur COLIN propose au DGS une liste d’une dizaine d’élus prêts, selon lui, à démissionner du Conseil municipal et me dit qu’on lui a proposé d’être Maire en réunion d’élus et qu’il a refusé
· Monsieur FLORIMONT vient me dire tout le mal qu’il pense du maire et qu’il est prêt à prendre sa place.
· Monsieur LAHITTE banalise les insultes du maire expliquant qu’il est comme ça et que même lui se fait insulter
· La femme du maire s’attaque à madame SALVY essayant de la faire culpabiliser sur la situation du maire…
· Monsieur COLIN dit au DGS que Monsieur LAHITTE n’a aucun courage
· Monsieur LAHITTE banalise devant témoin et devant le DGS les camps de concentration où il voudrait y mettre les écologistes
Cette liste est non exhaustive.
Je vous pose une question : comment un DGS doit-il se comporter lorsqu’il fait face à des situations de ce type ? Se taire ? regarder de l’autre côté ? Faire comme si de rien n’était ? Cautionner ?
Oui je l’affirme l’ensemble de ces faits est source de stress, d’anxiété, de remise en question sur le rôle qui devait être le mien, de nuits courtes, de lien de confiance que je pouvais avoir avec les élus en leur faisant prendre conscience de la situation dramatique dans laquelle se trouvent les agents.
Malgré tout, au moment de l’expression de la souffrance des agents, par le droit de retrait, tous ces actes et paroles de défiance entre adjoints et contre le maire ont totalement disparu. Ils ont tous fait bloc contre les agents et leur DGS alors qu’ils ont été largement informés, par mes soins, et des faits et de ce qui allait advenir (par mail du 23 novembre et en réunion d’adjoints du 30 novembre qui a donné lieu à compte rendu rédigé par Madame TASTET Corinne).
J’ai donc vite compris que je ne pouvais pas passer par les adjoints pour faire reconnaître cet état des personnels, ni pour envisager des solutions pour améliorer la situation. La période qui vient de s’écouler me l’a confirmé à plusieurs reprises.
J’ai donc moi-même exercé ce droit de retrait et je me suis retourné vers les services de l’Etat, en vain. Les élus brandissant le soutien de l’Etat en étendard.
Alors évidemment, ce sera démenti, puisque c’est ma parole contre leurs paroles. Mais cela existe et a existé. Et les élus concernés le savent pertinemment. Une citation me vient à l’esprit : « Nous savons qu’ils mentent. Ils savent qu’ils mentent. Ils savent que nous savons qu’ils mentent. Nous savons qu’ils savent que nous savons qu’ils mentent. Et, pourtant, ils persistent à mentir ».
Aujourd’hui, tout le monde sait tout cela et cautionne ce système fait de harcèlement, de tentatives de division, d’irrégularités, d’illégalités, de souffrances etc…
Je témoigne d’ailleurs ma grande admiration ironique à toutes ces personnes, tous ces élus qui par leurs votes, leurs soutiens, leur complicité de ce système arrivent encore à se regarder dans une glace et préfèrent parler d’un complot politique dont ils seraient les victimes plutôt que d’affronter leurs responsabilités et d’agir.
Cette Commune souffre d’un point de vue humain, administratif, organisationnel, financier, juridique et semble couverte très largement par les instances et leur inaction.
Seuls des audits en profondeur de l’ensemble du système communal sous les angles des risques psycho sociaux, humains et financiers seraient de nature à permettre de reconstruire les process et les relations. J’avais commencé à y travailler.
Je suis à ce titre surpris que l’on lance un audit financier par un consultant Monsieur Dominique LALANNE, ancien élu, qui par son parcours n’est pas la personne la mieux placée pour le réaliser, alors que la chambre régionale des comptes, qu’il suffit de saisir via la préfecture ou l’autorité territoriale, est l’instance la plus pertinente pour intervenir dans ce cadre.
Pour conclure, en vertu de l’article 25 alinéa 1 de la loi du 13 juillet 1983, il incombe à tout fonctionnaire d’exercer ses fonctions avec dignité, impartialité, intégrité et probité. J’y suis attaché et j’ai, dans le cadre de mes fonctions, gardé ces principes en tête.
J’ai également mesuré l’enjeu d’un devoir de réserve et de loyauté qui, en temps normal, doit être respecté, d’autant plus dans ma fonction, mais qui dans la situation exposée ne pouvait l’être. Je considère aujourd’hui que mes collègues et moi-même sommes des lanceurs d’alerte au sens du Décret 2017-564 du 19 avril 2017.
Au vu de la situation dans laquelle j’ai trouvé les agents, mes collègues, très vite après mon arrivée, j’ai fait le choix d’assurer d’abord et avant tout mon devoir de protection envers eux.
A cet effet c’est à mes collègues que je veux rendre hommage pour leurs qualités, leur conscience professionnelle, leur courage d’avoir exercé à titre individuel leur droit de retrait pour manifester leur souffrance et mal être, et leurs valeurs humaines, quand en face de nous, se vantant en cela d’être soutenus par madame la Préfète et Monsieur le Sous Préfet, les élus font de la petite politique faite de sales manœuvres, de sanctions, de vengeance personnelle, de brimades, de dénis et ne font preuve d’aucune humanité..
J’acte donc mon départ de la Commune de Pouillon en ayant le sentiment d’être resté fidèle aux valeurs du fonctionnaire garant du service public.
Cordialement.
Guillaume Boy