Transformer un logement à usage bourgeois en bureau au moment où l’Agglo prône le contraire, voilà qui fait désordre… Surtout quand on est le frère du maire.
Si l’un des nombreux écrivains habitant la Côte basque se tire actuellement les poils du nez en se demandant bien quel va être le thème de son prochain roman, qu’il s’installe immédiatement au 12 rue Simon Etcheverry à Biarritz : en effet, dans cet immeuble, comme à La Samaritaine, il se passe toujours quelque chose. Trente ans que des guerres picrocholines agitent les étages de cette belle maison bourgeoise située presque en face de l’épicerie Arostéguy. En 2014, le blog Bisque, Bisque, Basque, avait raconté comment le fantasque conseiller municipal Éric Bonnamy s’était approprié des parties communes et les avait tagguées, avant de lancer du troisième étage un sac d’ordures ménagères sur la tête d’une copropriétaire qui se trouvait au rez-de-chaussée. Malgré une lettre d’excuses, le tribunal de Bayonne avait condamné l’impétrant à être expulsé.
Le départ du colérique conseiller n’a pas pour autant ramené le calme dans l’immeuble et il y a toujours autant matière à roman pour un écrivain en panne d’idées. Depuis octobre 2021, c’est désormais Frédéric Lemos, propriétaire via la SCI Papagaio, de trois beaux appartements dans l’immeuble et son locataire Pierre Arostéguy, installé depuis octobre 2021 dans 188 m2 au premier étage, qui suscitent la colère des autres copropriétaires.

Pour vérifier les dires des habitants, les fins limiers de RamDam, se sont donc postés plusieurs matins de suite, début septembre, dans la rue Victor Hugo et ils ont pu observer un manège édifiant. Presque tous les jours, généralement vers 9h30, une ou deux personnes, parfois accompagnées de Pierre Arostéguy, sortent avec des dossiers sous le bras de la plus ancienne épicerie de Biarritz pour traverser la rue et entrer par le 12 rue Simon Etcheverry avant de se rendre au premier étage. Détail amusant, que les personnes soient seules ou accompagnées de l’occupant officiel des lieux, elles referment immédiatement à clé la porte d’entrée de l’appartement, comme si elles avaient quelque chose à cacher. De la rue Victor Hugo, on voit pourtant très bien par les fenêtres du premier étage, ces personnes aller et venir dans cet appartement, comme dans toute activité normale de bureau. Impression confirmée quand on les voit ressortir pour déjeuner avant de revenir. .
Le syndic : « Le frère du maire ? Vous n’y pensez pas ! »
Seul petit hic, le règlement de copropriété de cet immeuble est formel et prévoit qu’à « l’exception des locaux du rez-de-chaussée qui sont occupés commercialement » les appartements des autres étages ne « pourront être occupés que bourgeoisement », c’est à dire par une famille ou une profession libérale. Alors que le tribunal administratif vient de donner raison à l’Agglo (Sud Ouest, 17/9) dans sa volonté de transformer les locaux commerciaux en locaux d’habitation, ce « détournement d’usage » pour reprendre le terme juridique, fait vraiment désordre. Surtout quand la sœur du locataire présumé coupable est l’une des vice-présidentes de l’Agglo.

Persuadée de son bon droit, l’ancienne syndic bénévole de l’immeuble, Françoise Gestas, qui n’est pas la meilleure amie du monde de Frédéric Lemos, se tourne vers le syndic de l’immeuble Foncia qui botte en touche immédiatement : « Le frère du maire ? Vous n’y pensez pas. Nous ne ferons rien !» Comme si, dans notre République, le frère d’un maire n’était pas un citoyen comme les autres. Pugnace, elle décide alors d’écrire à la mairie. Et reçoit une réponse bien polie de l’Adjointe à l’Urbanisme Maud Cascino :

En gros, c’est une affaire privée, il n’y a rien à voir. Circulez !
Une proche : « Un appartement multi-usages »
Porosité propre aux petites villes, alors que les limiers de RamDam n’ont pas encore interrogé ni le locataire ni le propriétaire de l’appartement qui pose question, une proche de Pierre Arostéguy, miraculeusement informée de notre enquête avant même qu’elle ne soit publiée, monte au créneau et tente de déminer le terrain. « C’est un appartement multi-usages. C’est vrai qu’il accueille des salariés. Mais, il arrive aussi à Pierre quand il a de la famille d’y dormir et j’y ai moi-même entreposé des affaires ». On ne pouvait rêver plus belle confirmation de tout ce que nous soupçonnions, l’appartement « multiusages » étant une notion inédite et inconnue du droit immobilier. Surtout quand on possède par ailleurs, comme Pierre Arostéguy, une résidence principale sur les hauts de Biarritz.
Le propriétaire : « RamDam, ça ne m’intéresse pas beaucoup »
Interrogé par téléphone, Frédéric Lemos nous la joue grand seigneur importuné par des manants : « RamDam ? Ça ne m’intéresse pas beaucoup… » Avant de nous donner quelques leçons de journalisme : « Vous croyez peut-être tenir le scandale du siècle ? Si vous n’avez vraiment rien d’autre à faire… » Le bref échange lui laisse quand même le temps de geindre sur la triste existence des riches propriétaires : « Je n’ai pas de déclaration à faire, mais si vous vous intéressiez au marché immobilier à Biarritz, vous verriez qu’il y a plein d’appartements à louer. J’ai moi-même dans cet immeuble deux appartements qui n’ont pas trouvé preneur »… Sortez vos mouchoirs ! Renseignements pris, le loyer du 188 m2 occupé par Pierre Arostéguy serait de 2400 € mensuels, chiffre que les intéressés refusent de confirmer (« Puisque vous savez tout, pourquoi nous poser la question ? ») et les deux appartements vacants, plus petits, ne trouveraient pas preneurs à … 1800 euros. Vu le salaire moyen sur la Côte basque, voilà qui n’est guère surprenant, même si baisser le loyer demandé ne semble pas avoir traversé l’esprit du propriétaire démuni.
Le locataire : « Je monte une société de services »
Ramdam adorant se garder le meilleur pour la fin interroge ensuite Pierre Arostéguy. Pas étonnant qu’il s’entende bien avec son propriétaire Frédéric Lemos. Il se montre aussi cassant que lui. « Et d’abord que savez-vous de mes activités ? » Bref instant d’hésitation : « Vous êtes un épicier spécialisé dans les produits de luxe ». Agacement de l’intéressé. « Pas seulement, je suis en train de créer une société de services. Comme vous le savez puisque vous avez lu le règlement de copropriété, les professions libérales sont autorisées dans l’immeuble ». Grand blanc de notre part. « Et une société de services est assimilée à une profession libérale. Je suis donc parfaitement dans mon droit, cher Monsieur ». L’affirmation semble tellement avoir été travaillée sur mesure dans un cabinet d’avocats qu’elle éveille nos soupçons. « Et vous pouvez me dire quel est le nom de cette société de services ? » « Ah non, c’est encore top secret ! »
Nous essayons autre chose. « Vous pouvez me dire quand vous avez déposé les statuts de votre société ? » Réponse catégorique : « Ils ne sont pas encore déposés ».
L’idée de demander en urgence à RamDam l’achat d’une boule de cristal haute performance me traverse l’esprit. Avant d’interroger Pierre Arostéguy, j’aurais dû deviner à l’en croire qu’il était en train de plancher sur une « société de services » dont il n’a pas encore divulgué le nom ni déposé les statuts. Les chiffres se cognent un peu dans ma tête. Si l’on peut lancer une société de services à son domicile principal, la loi est formelle, il n’est pas possible de le faire à partir d’un appartement bourgeois loué pour l’occasion. Et puis franchement, quelle est l’entreprise qui va louer un an à l’avance des locaux et se coller 28 800 euros de loyer dans ses comptes avant même d’avoir gagné un sou ?
Je sors une arme secrète : « On m’a fait parvenir une inscription au Registre du Commerce datant du 1er octobre 2021 où l’entreprise « Caves et épicerie du Progrès » (le nom officiel de l’épicerie Arostéguy) donne comme domicile le 12 rue Simon Etcheverry »

Réponse immédiate de Pierre Arostéguy : « C’était une erreur de mon comptable, elle a été rectifiée immédiatement ». Le document, effectivement, n’est plus accessible sur Internet, mais l’impression de s’être fait promener dans les grandes largeurs demeure. « Je crois vraiment que vous me baratinez » sera notre dernier échange.
Dans cette affaire qui risque d’agacer nombre de candidats au logement sur la Côte basque, voilà la maison Arostéguy à belle enseigne.
Jean-Yves VIOLLIER
L’avis d’un juriste sur le dossier
Il faut croire que les maires ont encore un sacré pouvoir de nuisance sur la Côte basque, car ce juriste réputé vivant à Biarritz accepte de commenter le dossier d’enquête que nous lui présentons uniquement sous couvert d’anonymat : « Le rôle du maire est de faire respecter le Code de l’Urbanisme, donc la Loi. La réponse de Madame Cascino me laisse un peu perplexe et donne l’impression qu’elle botte en touche vu le nom de l’intéressé. Le locataire ne peut pas faire ce qu’il veut du moment qu’il a conclu un bail d’habitation, car le changement de destination s’attache à un local et non à la personne. Cette affaire relevait incontestablement de la mairie. Par ailleurs une politique très vigoureuse est actuellement menée à Biarritz pour que les entreprises se dotent d’aires de stationnement, proportionnelles à la taille du local qu’elles occupent. Cette obligation ne me semble pas respectée. Fiscalement, ce détournement d’usage pose aussi un problème concernant l’impôt local recouvré pour le compte des collectivités locales. Je conçois aisément l’embarras du maire dans cette situation, mais j’aurais été elle, j’aurais pris mon frère entre quatre yeux et je lui aurais intimé l’ordre de déguerpir immédiatement, car il la met dans une situation délicate politiquement ».
Faites donc le tour des propriétés de Biarritz vous allez voir que cette histoire n’est pas un cas unique bien au contraire, je peux vous en montrer des cas similaires jusqu’à des stockages d’alcools et de fûts de bière dans des box alors qu’il n’y a des manques cruels de places de stationnement dans ces mêmes propriétés. Je ne voudrais pas même parler de réparation de voitures, d’antiquaire qui y réparent des meubles, du stockages de planches de surf avec des dégradations du revêtement des sols à la clé et j’en passe. Tous bien entendu non déclarés comme usages professionnels et interdit par les règlements. Faites votre enquête et vous verrez que c’est devenu une habitude de longue date.
Gérard Schrepfer
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Il est préférable de voir un appartement occupé que vide… Quels sont les problèmes évoqués par ramdam ?
Le fait d’être frère du maire?
Le fait d’avoir su développer, transformer une affaire commerciale, familiale ?
Le fait de rassembler les activités managériales en proximité de l’activité et de saisir une opportunité d’un logement vacant ?
Le fait d’exploiter par jalousie le dénigrement….
Comme dit l’autre dit du bien de quelqu’un ça n’intéresse pas grand monde…dites du mal et les oreilles de branchent…
Gastigard Burucoa
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La fiscalité d’un appartement et d’un local professionnel n’est pas la même. Les entreprises sont obligées d’avoir des places de stationnement proportionnelles à la taille de leur logement. Et trouvez-vous normal qu’on dise à un copropriétaire « Vous avez raison, mais on ne fera rien car c’est le frère du maire »?
Ni jalousie, ni dénigrement de notre part… Juste de l’investigation!
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Tu as totalement raison, Philippe. Ces « Architectes anonymes » m’ont totalement embrouillé la tête.
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Quand je vois le temps passé pour pondre votre ramassis de conneries . Au temps de la gestapo vous l auriez dénoncé le pauvre Arosteguy .
Et quand bien même il a un logement … il crée de emplois met en avant que de bons produits et il faut des commerces comme le sien pour que Biarritz reste une ville attractive
Donc il est où le problème . Vous êtes aigris , jalous et des moins que rien
Passez votre chemin Gueux 😂
Laurent Bensimon
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Merci pour ce commentaire, si nuancé, laudatif et intelligent. Et toutes nos félicitations pour avoir pris le temps de lire jusqu’au bout notre « ramassis de conneries ». Monsieur aime souffrir!
En cherchant un peu nous découvrons grâce à votre adresse IP, que vous nous écrivez avec l’adresse mail d’un fabricant de tissu à Bayonne et patron d’un magasin à Biarritz. C’est très bien, mon petit Laurent, de se montrer solidaire de ses copains commerçants. Un bon point.
Quant à la Loi, visiblement, vous vous en contrefichez. Même si Pierre Arostéguy était un sauveur de l’humanité, ce qui ne m’est pas apparu évident lors de notre échange téléphonique, devrait-il pour autant être soumis à d’autres règles que les citoyens ordinaires? Bien sûr que non!
Jean-Yves Viollier
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Serait-il utile de rappeler que Maider (Marieeder) est bénéficiaire effectif de la société à savoir qu’elle détient 43% de la société ?
https://www.pappers.fr/entreprise/caves-et-epiceries-du-progres-572720647
Et que ce genre de conventions de location à un dirigeant est une convention réglementée décidée par les associés dont elle fait partie ?
https://www.entreprises.cci-paris-idf.fr/web/reglementation/developpement-entreprise/droit-affaires/regime-conventions-conclues-dans-sarl
Mathieu Castaings
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