Dans ce huitième volet de notre série sur les indemnités des élus, vous allez découvrir que professionnalisation des élus et convictions ne vont pas souvent de pair.
Actuellement, un élu ne peut dépasser dans ses fonctions un gain mensuel de 8 434,85 €, ( 5 910 euros nets mensuels) ce qui est confortable dans un Pays basque où le SMIC est souvent le salaire d’usage. D’autant plus que rien n’empêche par ailleurs cet élu de toucher une retraite s’il est en âge, à l’image d’un Max Brisson sénateur, conseiller départemental mais aussi retraité de l’Éducation nationale, ou de rester actionnaire d’une entreprise ou d’un cabinet d’avocats, ce qui est le cas de nombreuses figures de la politique comme en son temps Nicolas Sarkozy.
Pendant des années, en matière d’écrêtement, le trop-perçu d’un élu cumulard n’allait pas automatiquement dans la poche de l’État, mais restait à disposition de l’élu qui décidait à qui le reverser. Une façon de créer ainsi un obligé qui ne pourra plus décider en toute conscience mais votera comme vous, sous peine de perdre l’avantage pécuniaire que vous lui avez octroyé. On n’est pas loin du seigneur féodal et de ses vassaux. Là aussi la moralisation de la vie publique a permis de mettre fin à ce système d’un autre temps. Quand un élu atteint le plafond des indemnités possibles, c’est désormais l’institution où il a touché sa dernière indemnité qui récupère le trop-perçu.
Cette « professionnalisation » des élus, cette peur de perdre une manne ou de se retrouver dans la vie d’avant, souvent moins jouissive, a beaucoup d’effets pervers dans la vie publique. Car on retrouve toujours les mêmes dans les strates du département et tout le monde se tient un peu par la barbichette.
Contre la LGV à Bayonne et presque pour à Bordeaux
Prenons par exemple le cas de Mathieu Bergé qui a abandonné son activité professionnelle pour devenir homme politique. Conseiller municipal d’opposition à Bayonne et membre des Commissions municipales « Ville durable et stratégies urbaines, Finances, ressources humaines et ville numérique », membre des commissions extra-municipales taurine et langue basque, il est également conseiller communautaire à la CAPB et conseiller régional occupant un poste de délégué à la coopération transfrontalière et à l’Euro-région et délégué aux Ports et Aéroports.
De quoi bien occuper le personnage. Mais quand celui-ci par souci de ne froisser personne vote différemment sur le même sujet à Bayonne et à Bordeaux, le doute est permis sur la crédibilité de son travail. En assemblée à la CAPB, Mathieu Bergé lève le bras sans hésiter pour voter contre la LGV au Pays Basque. Quelques jours plus tard, à la Région il s’abstient sur le même sujet par souci de loyauté envers Alain Rousset, venant de rejoindre sa liste aux dernières élections régionales. Si Mathieu Bergé avait eu une activité professionnelle comme corde de rappel, cet élu par ailleurs gros bosseur se serait-il livré à une telle acrobatie intellectuelle ? (Lire le démenti partiel de Mathieu Bergé à la fin de cet article)
Michel Veunac, ou l’argent qui rend fou
L’argent qui arrive à flots suite à un heureux coup du sort électoral peut rendre fou. Michel Veunac en est la preuve. Obscur sociologue, vivotant d’études remplies de phrases creuses commandées par ses amis politiques de Pau, Bordeaux ou Bayonne, comme celle impérissable sur « Les débordements festifs de la jeunesse à Bayonne », (payée 48 000 euros tout de même), le maire de Biarritz déclarait en 2013 10 000 euros au titre de son activité de sociologue.
Il est sûr que lorsqu’on multiplie ses revenus par six après avoir été un obscur porte-serviette de Didier Borotra, on en redemande. Six mois après son avènement en 2014 devant Max Brisson, tous les Biarrots comprennent l’étendue du désastre qui les attend. Tous, sauf quelques courtisans et le maire lui-même convaincu de son talent.
Alors que ses adjoints démissionnent les uns après les autres, il convainc d’autres élus, à qui il offre délégations ou postes d’adjoints rémunérés de se rallier à lui (Éric Bonnamy, Laurent Orthiz, Louis Vial) et contre toute attente il réussira à faire avaliser le scandaleux vote sur l’Hôtel du Palais et son bail emphytéotique par 18 voix contre 17. Mais tous ceux qui ont changé d’avis juste avant ce vote, vous jureront la main sur le cœur que ce sont les argument du duo Veunac-Lafite qui les ont convaincus et non les nouvelles indemnités perçues. Défense de rire !
Convaincu de sa réélection, Michel Veunac décide de repartir au front en 2020, mais se gamelle lamentablement en obtenant 12,5 % des suffrages et en étant 5e derrière ses concurrents. Et pendant ce temps, les Biarrots découvrent que le Palais n’appartient plus à la Ville et est devenu quasiment invendable. Chapeau l’artiste.
François BERLAND
La transparence de Maïder Arostéguy et de ses adjoints
Une nouvelle génération d’élus est en train de se mettre en place et c’est tant mieux. Alors que personne ne leur demandait rien ni ne doutait de leurs paroles, Maud Cascino et Fabrice-Sébastien Bach, respectivement adjoints à l’Urbanisme et au Commerce, ont sorti leurs bulletins de salaires pour prouver leurs dires lors de notre réunion publique. Le lendemain, au téléphone, Maïder Arostéguy s’est montrée tout aussi transparente sur ses revenus : « Je suis effectivement écrêtée, c’est-à-dire au plafond de ressources possibles pour un élu. Je ne me plains pas, mais, même si je redoute quelques incompréhensions et jalousies de citoyens peu informés, j’estime être payée à la hauteur du travail et des responsabilités qui sont les miennes »
Pour être encore plus précise, le maire de Biarritz détaille son enveloppe : « 2670 nets à la mairie, 1310 € à la Région, 910 € à l’Agglo, 570 € au Siazim (Syndicat Intercommunal d’Aménagement de la Zone d’Ilbarritz) et depuis le début de l’année 450 € du syndicat des mobilités, soit un total de 5910 € nets par mois ».
Une franchise qui mérite d’être saluée.
Le démenti (partiel) de Mathieu Bergé
Bonjour,
Je viens de lire votre dernière publication qui contient 2 erreurs, d’une part je ne suis pas élu à temps complet, j’enseigne à temps partiel en lycée et à l’université, l’équivalent d’un mi-temps, depuis de nombreuses années, d’autre part si j’ai bien voté pour à Bordeaux, je me suis abstenu à la CAPB en expliquant que mon groupe politique sur Bayonne était opposé au projet et donc pour éviter une situation psychologiquement compliquée de voter pour à un endroit et contre dans un autre, je m’étais abstenu, mais j’ai rappelé la position contre du groupe Bihar Baiona en séance.
Tous ces éléments sont bien évidemment vérifiables.
Cordialement
Mathieu BERGE
La réponse de RamDam :
Bonjour Mathieu,
Ah les vieux, avec leurs oreilles mitées et leurs neurones qui se font la malle! Je suis totalement responsable de ces approximations et je m’en excuse. Suite à une conversation que l’on avait eue au bord d’un terrain de rugby, j’avais cru comprendre que tu avais cessé toute activité professionnelle autre que la politique. Et, faute d’avoir relu mes notes de l’époque, je me suis emmêlé les crayons dans tes votes. Reconnais avec moi que voter d’une façon à Bordeaux et d’une autre à Bayonne a de quoi dérouter les électeurs qui te suivent.
Cordialement.
Jean-Yves Viollier
Demain: Perdre ses convictions avant d’agir contre ses convictions.