Dans ce septième volet de notre série sur les indemnités des élus, vous allez découvrir que le fisc s’est toujours montré très bienveillant avec les politiques.
Un peu comme sous la Révolution française, où les indemnités des élus devaient rester cachées, un des grands secrets de la Ve République a été le prélèvement à la source sur les indemnités des politiques. Une aubaine pour les cumulards ! Tous les « petits mandats », à moins de 1200 € nets par mois « passaient à l’as » et n’étaient pas imposables, tandis qu’un voyageur de commerce travaillant pour plusieurs entreprises ou n’importe quelle personne obligée d’effectuer plusieurs emplois à la fois, continuait à additionner le total et à payer sur l’ensemble de ses revenus. Pour avoir fait plusieurs fois l’expérience avec des élus du temps où je travaillais au Canard enchaîné, (Surprise : ils acceptaient, à condition que je leur garantisse le off !) j’ai donc pu vérifier personnellement que les élus payaient environ la moitié des impôts d’un citoyen ordinaire et n’avaient pas trop de mal à décider de hausses d’impôts puisqu’elles ne les concernaient que très peu. Exception notable : le député Henri Emmanuelli avait osé en pleine Assemblée nationale s’attaquer au tabou de la fiscalité des élus et déplorer un état de fait totalement scandaleux. Un silence assourdissant sur les bancs de la droite comme de la gauche s’en était ensuivi.
L’élu, pas encore un citoyen fiscal ordinaire
Le législateur, peut-être suite au mouvement des gilets jaunes, s’est rendu compte qu’il fallait rendre les choses plus présentables. Il a donc remplacé le 20 janvier 2019 le prélèvement à la source des indemnités par le FRFE (le montant de la Fraction Représentative de Frais d’Emploi) (1° paragraphe de l’article 81 du code général des impôts).
Concrètement, les indemnités des élus deviennent imposables dans la catégorie salaires, ce qui n’est que justice surtout pour les élus qui ne font que de la politique. Mais on considère qu’un élu a des « frais » (lesquels, alors qu’il est invité plus souvent qu’à son tour ?) et il garde donc le droit de déduire une part non négligeable de ses indemnités :
– Pour les élus des communes de moins de 3 500 habitants : quel que soit le nombre de mandats détenus, l’abattement est de 18 085 €.
– Pour les élus des communes de 3 500 habitants et plus : lorsque l’élu n’a qu’un seul mandat, l’abattement est de 7 934 € (soit l’indemnité versée aux maires des communes de moins de 500 habitants, soit 17% du montant de l’indice brut).
Lorsque l’élu a plusieurs mandats, l’abattement est de 11 901€ (soit une fois et demie l’indemnité versée aux maires des communes de moins de 500 habitants).

Comme on peut le constater, un pas en avant considérable a été accompli, mais est-il logique que quelqu’un qui vit à plein temps de la politique ne paie pas les mêmes impôts qu’un citoyen ordinaire ?
Jean-Yves VIOLLIER
L’avis de RamDam : Il y a un mieux très net par rapport à des pratiques fiscales totalement scandaleuses qui ont perduré jusqu’au quinquennat Hollande, mais encore une fois, le législateur s’est arrêté à mi-chemin et se montre plutôt indulgent pour ceux dont la politique est devenue un métier. Que le petit maire d’un village rural, qui, après sa journée à la ferme, fait des heures supplémentaires à la mairie, puisse être exonéré jusqu’à un plafond de 18 085 €, on veut bien. Mais, même si un élu à 5 910 euros nets par mois, paie sans doute sa tournée plus souvent qu’à son tour, il est aussi bien plus souvent convié à des festivités, nourri et abreuvé que le citoyen ordinaire. Qu’il paie, à égalité de revenus avec un citoyen ordinaire, 3 213 euros de moins d’impôts reste plus que discutable. À titre indicatif, un journaliste professionnel déduit de ses revenus 7 650 euros de frais professionnels, ce qui correspond à une réalité pour les journalistes de terrain, avec de nombreux achats de documents et nombre de frais (achats de documents, de presse, essence, verres de contact…) Alors que l’État affirme vouloir aller vers une simplification, il serait bien inspiré d’aligner au même niveau toutes les professions ayant des frais d’emploi.
Demain: La professionnalisation des élus et se dangers