Ramdam 64-40 a rencontré le maire de Saint-Jean-de-Luz pour parler mobilité, îlot Foch et publicité des débats municipaux.
Maire depuis 2017, Jean-François Irigoyen a endossé le costume de premier magistrat après le décès brutal et soudain de Peyuco Duhart. Indécis au départ sur la suite à donner à cet engagement politique en première ligne, ses doutes ont été apaisés depuis. Réélu en mars 2020 au premier tour, il a pris le portefeuille de vice-président de la Communauté d’Agglomération Pays Basque aux Mobilités durables et innovantes, des Ports et de la Pêche. Il est également président du Syndicat des mobilités.
D’une casquette politique à l’autre
Jean-François Irigoyen alterne entre ses diverses casquettes quand Ramdam 64-40 lui pose des questions sur les mobilités douces. Un numéro d’équilibriste pour un maire qui n’était pas programmé pour succéder aussi brutalement à son prédécesseur. D’entrée il avoue que les « coronapistes » l’an dernier, en particulier celle qui a fleuri pendant l’été sur le BAB, «ont été posées dans la précipitation ».Il convient que « sur le vélo le syndicat des mobilités a lancé des études où l’on travaille avec le département ».

Alternant entre ses deux casquettes de maire et de président de syndicat. Il explique alors que la municipalité qu’il dirige a « lancé une étude sur un schéma cyclable sur l’ensemble de la ville. Sur cette mandature on veut intégrer un programme voiries conséquent il nous faut également le schéma cyclable ». Pour y parvenir, la commune devra procéder à d’importants travaux de sa voirie. Jean-François Irigoyen reprend alors sa casquette de président pour souligner que« le syndicat des mobilités porte des études mais ne fait pas d’aménagement. Ni l’Agglo, ni le syndicat des mobilités n’ont la compétence voirie ». Et c’est là qu’intervient sa troisième casquette de vice-président de l’Agglo aux mobilités puisque qu’il nous dit que « hormis les voies de trambus, qui sont d’intérêt communautaire, aucune voirie n’a été prise sur l’ensemble de l’agglomération ».
Des entreprises qui grognent
Jean-François Irigoyen, avoue qu’au vote du budget du syndicat des mobilités, « il y aura une augmentation du versement mobilité. On est à deux vitesses. L’ancienne ACBA qui est à 2 % et le reste du territoire qui est à 0,80 % ». De quoi faire grogner encore une fois les entreprises qui ne sont déjà pas satisfaites de la hausse des impôts de la part de la CAPB. Pour Jean-François Irigoyen « ce n’est pas le moment d’augmenter le prix du bus si on veut que les gens l’utilisent ». Le président-maire va prioriser les tâches pour l’année à venir : continuité du Trambus, mise en service du pôle d’échange multimodal de Hendaye et dans les tuyaux il y a celui de Saint-Jean-de-Luz sa ville, les parkings relais à Bayonne, aménagement entre Bassussarry et Maignon pour le bus en site propre, des parkings relais à Saint-Jean-de-Luz.
Entre offensives et agacement
Après avoir alterné entre ses trois casquettes, Jean-François Irigoyen reprend celle de maire de Saint-Jean-de-Luz pour défendre becs et ongles le projet de l’îlot Foch et la construction d’un parking souterrain. « Cela métamorphose ce coin. Aujourd’hui quand on voit une photo aérienne ce sont des rubans d’enrobés partout et de la bagnole partout. Cela fait partie d’un projet urbain qui vise à enlever les voitures de la surface », affirme le maire. Agacé par les questions récurrentes sur la proximité avec le port et d’une zone qui pourrait être inondée à l’avenir, le maire de Saint-Jean-de-Luz balaie d’un revers de la main cette hypothèse, « Les ingénieurs maîtrisent parfaitement ce type de construction », et place le commerce au centre des préoccupations des usagers. « Le commerce en centre-ville ne fonctionne que s’il y a du stationnement. On a une clientèle de Luziens qui ne sont pas des jeunes. Si on ne leur offre pas de stationnement en cœur de ville, ils iront à Leclerc, Carrefour. Ce parking a été fait pour garder cette clientèle de proximité. Il ne va pas attirer plus de voitures. C’est un parking d’entrée de ville quand on arrive de Ciboure », se défend l’édile. Il faut avouer qu’à Saint-Jean-de-Luz, la population est de plus en plus vieillissante et a parfois des allures d’Ehpad géant.
Le discours politique d’Herri Berri
Ce parking qui peut aller jusqu’à 7 niveaux (le nombre n’est pas encore défini) permettra en effet aux anciens d’arriver en plein cœur de la ville. De quoi mécontenter les défenseurs de l’environnement qui voient cette future construction comme un projet pharaonique totalement délirant. Le parking était prévu au départ sous la place Foch a été ensuite délocalisé vers la gare. « Quand on regarde la place Foch vers la gare, cela grimpe, vous prenez un géomètre avec une lunette, vous allez voir que le très légèrement, ça fait quelques mètres. On est proche du port. Le tunnel entre la France et l’Angleterre passe sous la Manche il n’est pas inondé, on n’est pas dans un sous-marin » lance-t-il en guise d’exemple. On ne peut pas dire que le dénivelé entre l’îlot et la gare soit d’une folle intensité. Pour se défendre, le maire attaque directement l’opposition. « Mes opposants aujourd’hui sont contre. Mais il ne faut pas oublier qu’Herri Berri, et ça j’ai les rapports du conseil municipal, n’a jamais été contre le parking mais contre son utilisation. Si on avait fait uniquement un parking pour les riverains et pour les commerçants ils étaient pour. On est dans un discours politique », affirme-t-il.
Jean-François Irigoyen ne cache pas ses réticences à voir les caméras prendre place au sein des conseils municipaux, même si RamDam 6440 est convaincu que c’est un sujet d’importance pour faire vivre la démocratie et permettre aux citoyens de voir les débats encore plus en ces temps de pandémie avec des conseils municipaux pour la plupart inaccessibles. « Ce que je ne veux pas, c’est que cela devienne un grand cirque sous prétexte qu’il y a des caméras». La ville va continuer de diffuser les débats tant que le confinement durera. Face au coût du prestataire extérieur (environ 1400 chaque conseil) le maire étudie la possibilité de pérenniser le dispositif mais en interne.
Encore un effort, et Jean-François Irigoyen va finir par se trouver photogénique et devenir une « bête de caméra » !
François BERLAND

Peio Etcheverry Ainchart :
« L’habitude de consulter l’opposition s’est perdue en chemin »
S’il est une ville où la démocratie est apaisée, c’est bien Saint-Jean-de-Luz. Opposant de longue date à l’équipe municipale, l’historien, écrivain et éditeur Peio Etcheverry-Ainchart, qui reconnaît entretenir des bonnes relations avec le maire actuel, Jean-François Irigoyen, dresse un portrait tout en subtilité du successeur de Peyuco Duhart. « Avec le décès brutal du maire en place, Jean-François Irigoyen ne s’attendait pas à se retrouver à la tête de la ville. Il a eu un peu de mal car il a tendance à être emprunté dans les relations humaines. »
Peio Etcheverry-Ainchart reconnaît que le néophyte de 2017 a beaucoup évolué… et pas toujours en bien : « Le timide est devenu autoritaire et ce qui est dommage, l’habitude de consulter l’opposition s’est perdue avec le temps ».
Le militant abertzale, membre du groupe Herri Berri, n’a pas digéré le refus du maire de débattre en public pendant la campagne des élections municipales de 2020. L’opposant reste particulièrement mobilisé contre la future construction d’un parking et déplore « une politique environnementale qui semble aux antipodes de ce que le maire déclare ». Caustique, il s’étonne des choix de celui qui est chargé des nouvelles mobilités à l’Agglo : « On essaie de sortir du tout voiture et on creuse un parking en plein centre-ville ! » Même agacement en ce qui concerne les eaux usées avec « un station d’épuration vieillissante et sous-calibrée » et la complaisance de la majorité municipale à l’égard des 45% de résidences secondaires de Saint-Jean-de-Luz : « On a quinze ou vingt ans de retard et on est parfois dans une caricature de politique à l’ancienne dans tous les domaines ».
Jean-Yves VIOLLIER