Pour intimider un assistant parlementaire du Sénat, la police a encore des effectifs

En congé maladie, suite au harcèlement subi en travaillant pour la sénatrice Joëlle Garriaud-Maylam, Philippe a été entendu à la gendarmerie de Bayonne pour savoir ce qu’il pensait du Sénat et s’il connaissait Mediapart. On rêve…

Voilà une histoire qui ne va sans doute pas beaucoup faire rire les cafetiers de Bayonne qui l’ont mauvaise depuis qu’ils ont appris que leurs horaires d’ouverture seraient limités pendant la Foire aux Jambons, faute d’effectifs policiers suffisants. Pour notre part à RamDam, ce n’est pas une surprise de découvrir que ce qui vaut pour le citoyen ordinaire ne vaut plus lorsqu’il y a des enjeux politiques!

France Bleu, 28 mars.

Depuis des années, Philippe*, figure bien connue de Biarritz, est tombé dans la marmite de la vie publique. Élu délégué consulaire des Français de l’étranger en Belgique, il accepte  en mars 2019 de devenir assistant parlementaire de la sénatrice des Français de l’étranger Joëlle Garriaud-Maylam, sans se douter qu’il se jette dans la gueule du loup. « Je n’ai découvert qu’après coup, raconte le placide quinquagénaire, que j’étais son 43e ou 44e assistant parlementaire depuis 2004. »

Comme l’a raconté Mediapart, qui a enquêté sur les burn-out à répétition dans l’entourage de la sénatrice, ordres, contre-ordres et engueulades se succèdent tous les jours. Une ultime réflexion, une de trop « Mais comment t’as fait pour faire Sciences-Politiques? » et Philippe décide d’arrêter les frais en juillet 2019.

https://www.mediapart.fr/journal/france/190620/harcelement-moral-le-cas-garriaud-maylam-embarrasse-gerard-larcher

Devant la gravité de son état de santé, le médecin de Philippe le met en arrêt maladie avant que l’assurance maladie ne lui accorde une invalidité professionnelle en 2020. Tout cela ne serait qu’une banale histoire de harcèlement professionnel, malheureusement beaucoup trop courante dans les milieux politiques, si un rebondissement inattendu n’était survenu au début de cette année.

Thé mondain ou interrogatoire de police ?

Mediapart, depuis le conflit sur la réforme des retraites, cherche à savoir le montant de la retraite de Gérard Larcher, une demande qui semble bien légitime quand on est le numéro deux de l’État.

Toujours en prise avec ses problèmes de santé, et alors que son congé maladie a été prolongé sans hésitation le 20 janvier 2023, Philippe, totalement surpris, reçoit le 25 janvier 2023, un appel du pole judiciaire de la gendarmerie de Paris, lui demandant de venir dans la capitale pour répondre à des questions.

Impossible car l’intéressé, au vu de son état de santé, n’a pas le droit de quitter le département sans une autorisation préalable de l’assurance maladie. Mais il faut croire que l’affaire est d’importance, puisque deux jours plus tard, Philippe est vivement incité à se rendre à la gendarmerie de Bayonne, où il se retrouve enfermé dans une salle sans fenêtre pendant trois heures, en visioconférence avec le policier parisien qui l’a appelé.

Il est traité fort courtoisement, mais la première question posée va tout de même laisser pantois « le présumé délinquant » : « Que pensez-vous du Sénat ? ». On est dans un thé mondain ou dans un interrogatoire de police ? En homme respectueux des us et coutumes de la République, Philippe salue l’institution, tout en ne cachant pas ses déboires avec la sénatrice Garriaud-Maylam. Les questions se font de plus en plus précises et l’assistant parlementaire comprend qu’il a en face de lui un spécialiste en informatique. Pas de chance, l’intéressé reconnaît de son propre aveu être une bille en ce domaine. Si quelques chiffres sur le train de vie du Sénat se sont égarés dans la presse, il va donc falloir chercher ailleurs !

Une police politique en France ?

La presse semble d’ailleurs beaucoup intéresser le pandore de service. « Connaissez-vous Mediapart ? » Philippe explique qu’il est abonné au média d’investigation comme nombre de Français. « Connaissez-vous Antton Rouget, l’auteur des quatre articles sur la sénatrice avec qui vous travaillez  ? » Tiens, tiens, nous y voilà, Antton Rouget étant le tenace enquêteur qui s’intéresse au train de vie du président Larcher et qui s’est aussi occupé des « conquêtes » de Darmanin. Pas de chance pour le policier de service, Philippe sait juste qu’il est l’auteur des articles sur la sénatrice qui l’employait.

Philippe ressort au bout de trois heures, se demandant bien ce qu’on lui voulait et ce que les policiers cherchaient. Un ennui en entraînant un autre, la CPM de Bayonne semble depuis peu remettre en cause sa maladie professionnelle et suspend ses paiements.
L’État français qui tenterait d’intimider un citoyen français à l’aide d’une « police politique »? Il faut avoir mauvais esprit comme un adhérent de RamDam pour croire une minute à une telle possibilité.

Jean-Yves VIOLLIER

* Le prénom a été délibérément changé.

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