Ils ont accepté de partager le pouvoir, quelle horreur !… Ou plutôt quelle erreur ?
À Ramdam, même pas peur, nous avons pris le risque de rencontrer un maire qui a décidé d’adopter une étrange ATTITUDE : ne voilà-t-il pas qu’il invite les citoyens qui l’ont élu à donner leur avis sur les décisions importantes. Encore un dégât collatéral du confinement ! décidément là-haut ils ont décidé de nous pourrir la vie et pourtant pour le coup ça ne vient pas de Chine.

C’est à l’aube dans un lieu que nous garderons secret, une usine désaffectée, ancienne manufacture de suppositoires à la sève de pin que nous avons donné rendez-vous à cet électron libre de la politique locale : Julien Fichot ? nouvellement élu maire de la commune de St Martin du Seignanx.
Après avoir vérifié que nous n’avions pas été suivis par le monde d’avant, c’est à la lumière des frontales que l’entretien débute. Première surprise : Julien Fichot (certainement un pseudo) bien que masqué, n’a pas vraiment le profil d’un délinquant, posément il nous expose les bases d’une nouvelle gouvernance qu’il a avec son équipe décidé d’appliquer dès le début de son mandat.
– En premier lieu une adjointe sera en charge de la démocratie participative et sera garante de la mise en place des modes opératoires de conseils participatifs et plus généralement de l’implication de la population.
– Pour chaque projet structurant dépassant un coût de 300 000 € un conseil spécifique sera constitué ; Chaque conseil sera composé de quatre citoyens tirés au sort sur les listes électorales qui seront accompagnés de quatre élus et de quatre techniciens ressource.
– Les citoyens concernés recevront au préalable une formation technique et administrative sur les sujets qu’ils auront à traiter et seront tenus au respect de la règle du conflit d’intérêts.
– Un porte-parole des citoyens viendra rendre compte devant le conseil municipal des travaux du conseil participatif dont il est membre.
– L’un de ces conseils sera constitué pour deux ans afin d’examiner tous les avant-projets immobiliers de la commune présentés par les promoteurs.
La plante invasive de la démocratie
Nous avions déjà évoqué des modes de gouvernance considérés comme alternatifs, en comparaison des habitudes ancrées depuis des lustres dans notre vie politique locale. Nous nous étions fait violence jusqu’à nous demander jusqu’où dans notre démocratie représentative pourrait-on raisonnablement pousser le curseur de la participation directe des citoyens ?
Que ce soit revendiqué par les listes qualifiées de »citoyennes » et parfois jugées utopistes comme à Ondres (notre post du 28/02/2020) ou déjà expérimenté par la mise en œuvre de pré-conseils ouverts à l’expression de tout à chacun comme à Bordeaux, l’implication des citoyens serait-elle devenue une nouvelle plante invasive dans notre paysage politique ?
Favorisée par »l’effet gilets jaunes » cette tendance émerge lors des dernières élections municipales répondant au déficit manifeste de transparence et de concertation que certains administrés ressentent comme du mépris de la part des élus.
Nous avions entendu dire qu’à Capvern dans les Hautes Pyrénées, quatre personnes extérieures étaient invitées à siéger à côté des élus dans la majorité des commissions de travail préparatoires aux décisions, mais nous étions loin de soupçonner que le péril était à notre porte.
Pourtant à Ramdam, nous pensions connaître le sujet car nous avions assisté à moult réunions publiques participatives dont l’unique objectif était d’informer la plèbe sur des décisions déjà prises dans l’entre soi du bureau feutré du »saigneur » local. Mais loin de nous l’idée que des inconscients oseraient bousculer l’ordre établi, au risque de faire frémir les sous-préfets.

Néanmoins, au milieu de tout ce barouf certains convaincus qu’une décision partagée est est une décision mieux acceptée verront une lueur d’espoir dans la »positive attitude » de ces nouveaux élus qui ont pris conscience des attentes de leurs administrés et acceptent de tenter l’expérience de la cogestion. D’ailleurs ces communes »laboratoires des bonnes pratiques démocratiques » tentent de se constituer en réseau afin de partager leurs expériences.

Nous savions déjà que selon la légende, Saint Martin avait d’un coup de glaive partagé son manteau pour en donner la moitié à un mendiant rencontré au bord d’un chemin, mais monsieur le maire vous n’allez tout de même pas viser la béatification sous prétexte d’avoir partagé le pouvoir au lieu de le confisquer ?
Alors Julien, sans familiarité de notre part, ne prends pas la grosse tête, même si Saint-Julien du Seignanx ça sonne bien ! Mais si tu persistes tu as tes chances pour figurer au palmarès des »Harpes 2020 », ce trophée délivré par Ramdam qui récompense les élus dont l’action mérite d’être saluée.
Malgré tout un espoir de célébrité demeure car si le Pouvoir est devenu un »sport extrême » praticable même dans nos campagnes, peut-être allons-nous assister à Saint-Martin-de-Seignanx à l’avènement d’une première »station d’attitude » dans les Landes
Dominique LAPIERRE