Le meilleur plan immobilier de Biarritz

50 euros la nuit au mois d’août pour un trois pièces avec parking gratuit et vue mer exceptionnelle… C’est possible, mais juste pour quelques privilégiés.

Voilà qui va mettre de bonne humeur tous ceux qui râlent car ils n’arrivent pas à trouver un logement à l’année sur la Côte basque, et tous ceux qui campent sur le site Airbnb où le moindre 3 pièces vacant en août à Biarritz se négocie à 200 euros la nuit. Il existe un endroit tout à fait plaisant où les prix restent aussi raisonnables que la vue est à couper le souffle. Le phare de Biarritz et le bâtiment qui est à sa droite quand on arrive sont en effet occupés par des privilégiés qui ne mettent pas trop à mal leur bourse en se rendant sur ces lieux exceptionnels. Seul hic, ces locaux particulièrement enviables appartiennent aux Phares & Balises, dépendant du secrétariat d’État à la Mer et sont officiellement occupés « pour contraintes professionnelles ». Des contraintes professionnelles très élastiques, comme on va pouvoir le constater.

Depuis début août, Ramdam 64-40 s’est rendu à de nombreuses reprises sur l’esplanade Élisabeth II, où se trouve l’édifice érigé en 1834, et a accumulé des observations très édifiantes. Ce ne sont pas des voitures modestes qui stationnent dans l’enceinte du phare, les Audi étant plus nombreuses que les Clio et les plaques minéralogiques (19,44…) indiquant souvent de lointaines provenances.

Ajoutez à cela quelques réflexions de voisins qui affirment que des fêtes mémorables se déroulent dans ces lieux pendant l’été, et il n’en fallait pas plus pour mobiliser les curieux patentés que nous sommes.

Adjointe au chef du service Sécurité et Contrôles Maritimes et cheffe de la Division Sécurité, Navigation, Prévention Risques à Bordeaux, Solange Majourau a accepté de répondre à toutes nos questions avec beaucoup de franchise et un sens ardent du service public, même si nous ne sommes pas toujours convaincus par son discours fort habile.

« Une façon d’entretenir l’ouvrage »

Dans ce bâtiment historique qu’est le phare de Biarritz, Madame Majourau reconnaît que les appartements disponibles sont assez grands avec des chambres en enfilade. Le prix à la nuitée est de « 40 à 50 euros, en fonction de la saison et réservé au personnel des Balises et Phares avec un maximum d’une semaine. »

Des logements au premier étage avec une vue exceptionnelle.

Madame Majourau nous rappelle que les phares ne sont plus occupés depuis les années 90 et que l’argent ainsi récolté « est une façon d’entretenir l’ouvrage ». La cheffe de service souhaiterait que « tous les phares de France soient ouverts, même si certains sont fort vétustes actuellement »  car l’ouverture crée des emplois et fait tourner les commerces. Solange Majourau précise enfin que seul le personnel des Phares & Balises a le droit d’occuper ces logements, car les agents d’astreinte peuvent être amenés à intervenir et rentrer dans les chambres à tout moment. Une contrainte que n’accepterait pas le grand public.

En ce qui concerne le joli bâtiment à droite du phare, Madame Majurau affirme que les appartements sont habités à l’années « par des gardiens d’astreinte qui peuvent intervenir en cas de panne de l’allumage automatique du phare ».

Il y a pire punition qu’occuper ce logement.

Un discours qui fait sourire l’ ancien salarié des Phares & Balises qui nous pilote dans ce dossier. « Avec les systèmes modernes, il n’y a pratiquement jamais de panne et les astreintes sont plus que minimes. Je connais bien le phare de Biarritz et je ne vois vraiment pas pourquoi des agents seraient amenés à intervenir dans les chambres ». L’ancien salarié poursuit : « Quant au gardien obligé d’occuper le logement à côté du phare, c’est une blague totale. Ce n’est pas un simple gardien qui vit dans ce logement mais un chef de service avec toute sa famille. Comme beaucoup de petites entités de l’État, les Phares & Balises ont gardé leur patrimoine immobilier en justifiant de nécessités de service alors que ce patrimoine sert surtout à récompenser les gens bien en cour dans la maison. La subdivision de Bayonne est située avenue de l’Adour… à six kilomètres exactement du phare de Biarritz. Il est évident que cette maison devrait être vendue depuis longtemps et qu’une simple ronde suffirait.  Mais tout le monde veut conserver son pré carré et les privilèges qui vont avec ».

Des prix qui font désordre

 Nous rappelons donc Solange Majourau, qui reconnaît que ce n’est pas un gardien qui occupe à l’année le bâtiment annexe mais « un chef de subdivision qui assure les astreintes. Comme le prévoit la Loi, le loyer est fixé par les services de l’État à 50% de la valeur locative. »

À Biarritz, on a vu au moment de la vente des écuries de Bigueyrie ou de la villa Sion à quel point les estimations des Domaines pouvaient être déconnectées de la réalité. On imagine donc que ce demi-loyer n’a rien de féroce, loin, très loin des 800 euros mensuels pour un deux-pièces que les propriétaires n’hésitent plus désormais à réclamer.

Quant aux 50 euros par nuitée dans l’appartement du phare, somme qui nous paraît inouïe par sa modestie, Solange Majourau n’y voit rien à redire. Et quand on lui dit qu’il nous paraîtrait normal, alors que la dette de l’État ne cesse de gonfler, de demander au minimum le double pour ceux qui séjournent l’été dans cet endroit privilégié, la cheffe de service est persuadée que plus personne ne viendrait.

Faute de goût absolue, Emmanuel Macron, cet été,  est descendu de son scooter des mers pour demander aux Français de faire des efforts d’économie d’énergie. Il n’est donc pas surprenant de découvrir dans cette affaire que chaque fonctionnaire à son niveau  joue au plus malin avec l’État en étant d’accord pour qu’on vende le patrimoine immobilier inutile, sauf quand c’est le sien. Alors que le Pays basque vit une crise immobilière sans précédent, voilà qui fait désordre.

Jean-Yves VIOLLIER

2 commentaires

  1. Encore bravo pour le travail et les sujets que vous réalisez. Encore un exemple de la façon dont le patrimoine de l’état est géré. D’ailleurs, il serait intéressant de savoir aussi pourquoi depuis le départ de la Gandarmerie de Lescar pour Pau, les bâtiments (caserne et immeuble d’habitations) sont toujours fermés, au lieu d’être vendus…
    Chris Larroude

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  2. Pour relativiser ; Oui mais dans les faits ça sert à des familles qui ne pourraient pas se payer des vacances à Biarritz. Et ce patrimoine si il était vendu, le serait à des étrangers car trop cher. Je préfère qu’il soit occupé par des agents en poste qui servent leur pays et qui trouveraient difficilement à se loger chez nous.

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